Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • Livres sur Courbet

    On parle beaucoup de Courbet ces temps-ci. Ce regain d’intérêt ne doit rien à un anniversaire, puisque le « maître peintre d’Ornans » est né en 1819 et mort en 1877. Michel Ragon et Henri Raczymov publient simultanément, le premier une biographie, le second un essai. 

    courbet.JPG

    A la lecture de leurs ouvrages, qui puisent aux mêmes sources et reproduisent les mêmes anecdotes et citations, on peut se demander si le principal adversaire de Courbet n’est pas Courbet lui-même. Pour vaincre le Paris du Second Empire, le « maître d’Ornans » cache ses complexes de provincial et de cancre derrière des attitudes de matamore ; il exagère son aspect physique et son accent jurassien.  L’essayiste comme le romancier ne peuvent faire le départ entre ce qui ressortirait d’une attitude calculée pour faire parler de lui, et ce qui relèverait de sa balourdise et de sa naïveté naturelles.

     Dans une biographie bien organisée et de lecture agréable, M. Ragon présente un peintre à la recherche d’une expression qui « reproduise la nature en l’amenant à son maximum de puissance et d’intensité » (Castagnary). De fait, Courbet chamboule la peinture. Delacroix est interloqué. Théophile Gautier qualifie Courbet de Watteau du laid. Les Goncourt l’éreintent. Objet de scandale, il devient célèbre. Ses toiles se vendent, le Pouvoir le courtise. Si on le moque ici, ailleurs on le prend pour chef d’une nouvelle école, l’école dite réaliste. Avant lui Corot, Daubigny, Ravier, Boudin, Jongkind, les peintres de Barbizon et bien d’autres, ont peint la réalité avec une grande liberté de facture.

    Mais le réalisme de Courbet relève de tout autre chose. Il prend « l’allure d’une insurrection », selon le mot de Baudelaire. Il sent la poudre ou, plutôt, l’anarchisme et le socialisme, car le peintre a une idole, la seule à part lui-même : Proudhon. Avec la Commune, Courbet se laisse entraîner dans une audace de trop, un prélude à la mort, six ans plus tard à la Tour de Peilz, en Suisse, où il s’est exilé, incapable de payer la reconstruction de la Colonne Vendôme dont on l’accuse (à tort) d’avoir ordonné la destruction.

    Michel Ragon Gustave Courbet peintre de la liberté Fayard, 486 p.